Palombe&tradition N°72
Numéro d'AUTOMNE
2021
SOMMAIRE
4 L’écho des Cabanes…
10 MIGRATION - On voudrait oublier 2020
14 MÉMOIRES DE PALOUMAYRES - Michel Morlaas, l’enfant de Salies de Béarn
16 JUSTICE - Les chasses traditionnelles dans le viseur du Conseil d’État
18 HISTOIRE - NERAC, la Mecque des palombes
20 ESSAIS - Deux modérateurs de son testés pour vous
27 SOUVENIRS D'AILLEURS - Italie 1622
28 AUPRES DE NOS ARBRES - Silence ça pousse
31 Les Prévisions de passage du Paloumayre
32 TABLEAU DE BORD 2021
35 PALOMBE EN RIMES - La palombière
36 ELEVAGE - Lou Palouquet : Les secrets de monsieur Laby
42 LE COIN DES PALOUMAÏRES - La lune influence-t-elle la migration
44 AUTOUR D'ELLES... - Toi, le tracteur de la cabane
48 ANECDOTE - Un tracteur introuvable…
50 CHIENS - Mâle ou femelle: que choisir?
52 «LA TETE DANS LE CIEL...» - Une palombe très particulière
56 ITALIE - Une histoire qui finit bien
58 LES RECETTES DU PALOUMAYRE
Edito
Une tempête peut en cacher une autre
lors que tout était réuni pour que la fête soit belle, la saison 2020 avait été gâchée par une succession d’aléas climatiques, avant de se clore prématurément dans un couvrefeu «Covidique» pour le moins confus.
Tous les paloumayres avaient donc reporté leurs espoirs sur la saison 2021, rêvant d’une année parfaite, s’il en existe, au moins exemptée d’inquiétudes liées aux restrictions sanitaires.
Pourtant, à l’heure où j’écris cet éditorial, rien n’est encore gagné. Malgré un taux de vaccination toujours grandissant, les contaminations par les nouveaux variants n’ont cessé d’augmenter ces dernières semaines. Mais si le taux hebdomadaire de nouveaux vaccinés se maintient, nous devrions envisager la saison qui arrive plus sereinement. Espérons et croisons les doigts.
Comme si un malheur n’arrivait jamais seul, un nouveau tsunami vient d’assommer la communauté des chasses traditionnelles, avec notamment l’interdiction par le Conseil d’État de la chasse des alouettes aux pantes et à la matole dans le sud-ouest mais aussi des tenderies aux vanneaux et aux pluviers dans le nord.
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, qui est censée signer et appuyer ces arrêtés auprès du Conseil d’État, n’a jamais caché sa détestation pour les chasses traditionnelles. Début août 2020, tout juste nommée dans ses nouvelles fonctions, elle déclarait dans les colonnes de notre confrère l’Express: «Les chasses traditionnelles sont une vraie problématique particulière à la France».
Alors que toutes les études montrent que la diminution des effectifs des oiseaux des champs est essentiellement liée à l’agriculture intensive et aux traitements chimiques divers et variés qui sont effectués, on préfère encore une fois désigner les chasseurs comme coupables. Tout est pourtant parfaitement encadré et les prélèvements ultra limités dans ces chasses anciennes qui passionnent encore quelques irréductibles et font partie de notre patrimoine cynégétique.
La chasse traditionnelle à la palombe n’est pas encore concernée par ces interdictions mais croyez-vous que nous sommes pour autant à l’abri des attaques de ceux qui considèrent ces pratiques comme cruelles et d’un autre temps? Heureusement les populations de palombes se portent bien, quand elles ne sont pas considérées comme beaucoup trop importantes par le milieu agricole mais ne vous y trompez pas, certains seront prêts à faire valoir que nous aussi nous utilisons des pantes et des appelants et que nous prélevons suffisamment d’oiseaux au fusil sans avoir besoin de recourir à des méthodes d’une époque révolue. Alors êtes-vous prêts à vous résoudre à regarder passer les belles bleues par la fenêtre de votre salon et à ranger vos filets dans le grenier comme d’autres souvenirs du temps passé?
Si ce n’est pas le cas, mieux vaut nous mobiliser assez tôt pour éviter une catastrophe. Plusieurs manifestations étaient prévues à la fin de l’été pour faire valoir nos revendications et nos dirigeants semblaient prêts à prendre les choses en mains. Mais ne nous leurrons pas, l’avenir s’annonce incertain avec la pression de plus en plus forte exercée par les anti-chasse, les défenseurs de la cause animale et autres végans intégristes. Aux yeux de certains nous ne sommes que des cruels prédateurs rescapés d’une époque où il fallait chasser pour survivre. Il s’agit donc pour nous de savoir expliquer notre passion et de nous montrer exemplaires dans nos pratiques et nos modes de gestion de l’espèce qui nous est si chère. N’imaginons pas que le folklore et le taux de sympathie qui entourent notre chasse traditionnelle dans les régions où elle fait encore partie d’un patrimoine culturel, nous mettent à l’abri des attaques de ceux qui n’ont jamais senti leur cœur battre la chamade en voyant un vol d’oiseaux bleus tourner sur leur bois un beau matin d’octobre.
Très bonne saison à tous.
Joël Barberin, Directeur de la publication
A
Migration - On voudrait oublier 2020
Alors que la grande vague bleue déferlait enfin, le confinement était venu stopper la saison d’une majorité de paloumayres. Celle-ci fera-t-elle oublier les mauvais souvenirs? Tout le monde le souhaite mais les incertitudes sont encore nombreuses, sauf sur l’état de santé des populations de palombes
Dans une vie de paloumayre, la saison 2020 restera un mauvais rêve, pour ne pas dire un cauchemar. Tout semblait s’être ligué contre nous: la météo, la pandémie alors qu’une fois n’est pas coutume des millions de palombes avaient décidé de déferler jusqu’à la péninsule ibérique. Tout avait commencé avec des conditions climatiques épouvantables. La tempête Alex pour débuter ravagea plusieurs vallées du sud-est, puis des pluies et du vent dégoûtèrent les oiseaux de bouger une plume jusqu’à la Saint Luc. Symbole de ce blocage, le plateau de Millevaches, carrefour traditionnel de la migration, resta bloqué par les intempéries, jusqu’à cette fameuse date du 18octobre où le ciel s’ouvrit enfin pour nous faire comprendre que de gros stocks d’oiseaux s’étaient constitués dans le nord-est et le centre de la France et ne demandaient qu’à foncer vers le sud. Mais la trêve météorologique fut de courte durée puisque Barbara, une nouvelle tempête, se mit à souffler à plus de 200 km/h sur les cols de la Haute Soule et [...]
élevage - Lou Palouquet: Les secrets de monsieur Laby
Nous avons voulu en savoir un peu plus sur les origines de ce fameux mariage rouquetpalombe. Nous sommes donc allés voir monsieur Laby afin qu’il nous livre les secrets de cette hybridation insolite.
Jean-Pierre Laby habite à Gamarde-les-Bains dans les Landes. Ce petit village situé à une quinzaine de kilomètres de Dax est connu pour son eau thermale aux vertus dermatologiques. Ses propriétés apaisantes et anti-irritantes sont reconnues par l’Académie de Médecine depuis 1841.
A peine arrivé, le maître des lieux nous met déjà dans l’ambiance: « Ici, tout le monde se tutoie, alors pas d’exception! Un petit café pour commencer ?» Autour de la grande table de la salle à manger, sa femme et Christian Boueilh, son ami et compagnon de cabane ont déjà pris place.
Jean-Pierre Laby chasse la palombe depuis 1968. Au début, il n’avait que deux appeaux et ne chassait que le samedi et le dimanche. «À 21 ans on ne reste pas forcément à la palombière, on a la bougeotte. Résultat, une seule et unique palombe la première saison. J’y suis pourtant resté 32 ans», commence JeanPierre Laby.
Le café terminé, la tasse rincée à l’eau de vie de poire, -non thermale celle-là - avant de nous amener voir le roi de la volière, le chasseur nous invite à visiter sa cabane située à quelques centaines de mètres à peine de chez lui.[...]
justice - Les chasses traditionnelles
dans le viseur du Conseil d’État
Le 6 août, le Conseil d’État a annulé les arrêtés autorisant les chasses traditionnelles et notamment celle des filets et matoles aux alouettes. Les paloumayres redoutent pour leur avenir. L’heure est à la mobilisation
C’est un pavé dans la mare. Le monde de la chasse est abasourdi après la décision rendue, en plein été, par le Conseil d’État. Saisi par la Ligue de protection des oiseaux (LPO) et l’association One Voice, la plus haute juridiction administrative française a annulé les arrêtés ministériels qui autorisaient la chasse à l’alouette des champs avec des filets et des matoles dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot-etGaronne et des Pyrénées-Atlantiques. Cette décision va même au-delà puisque sont également concernées les tenderies ardennaises des grives, vanneaux et pluviers.
Le Conseil d’État constate que les autorisations ministérielles en cause, d’une part ne sont pas dûment motivées et, d’autre part, que le ministre n’a pas été en mesure d’établir que ces méthodes de chasses, certes traditionnelles, sont les seules permettant de procéder à la capture de ces oiseaux. Or, comme l’a précisé la Cour de justice de l’Union Européenne en mars 2021, le seul motif de préserver ces méthodes de chasse dites «traditionnelles» ne suffit pas à [...]